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Prenons le temps d'aller au Brésil...
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19 octobre 2014

L'homme tranquille

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Voilà enfin notre première expérience de wwoofing chez des brésiliens pur souche. On vous présente Sandro et Mariana.

Sandro, 46 ans, était un Carioca (habitant de Rio) et ancien révolutionnaire de gauche dans les années qui ont suivi la dictature au Brésil. Il émigre dans la fôret de Patrimonio da Penna au début des années 90 où avec quelques amis, il forme une communauté dans le magnifique parc de Caparao. Sandro a une vie spirituelle très riche, à l’époque il suit les préceptes de l’église Santo Daime. Il est coutumier de « Arasaka » thé des shamans, il a même été formé au rituel de ce breuvage par un maître en Amazonie. Mais Sandro veut rester libre, 2 ans plus tard, il se sépare de la communauté notamment parce que celle-ci veut qu’il coupe cheveux et barbe pour suivre les principes strictes de l’église. Sandro doit se battre pour garder sa part de terrain qu’il s’est acharné à rendre fertile. Grâce à une loi brésilienne qui stipule qu’une terre disponible vous appartient si vous la cultivez depuis plus de 5 ans, aujourd’hui, la parcelle de 5 hectares est à lui.

La vie de Sandro a beaucoup évoluée au fil des ans. Après l’expérience de la communauté, il s’est construit une maison de terre et s’est nourri avec ce qu’il trouvait sur place. Il est resté 2 ans sans redescendre à la ville et a même passé 8 mois sans parler. Ensuite, il a rencontré sa femme avec qui il a eu 2 enfants. Le terrain a donc accueilli une maison de béton plus grande. L’électricité est venue après, quand le projet « Luz por todos » a été porté par le Président Lula afin que tous les pauvres aient la lumière. La télé a été récemment rajoutée, coupe du monde oblige, et internet aussi (piraté par un ami). Sandro raffole de Facebook et à retrouver le lien avec sa famille.

Ne dîtes pas de lui que c’est un ermite, malgré son look et son passé. Il est d’une nature conviviale, souriante et généreuse. Sandro a gardé son âme d’enfant, il s’émerveille toujours devant son ciel étoilé, devant la vidéo d’un solo de batterie de Dream of Theatre ou lorsque son équipe, Flamengo, marque un but. Si une soirée s’allonge, il a toujours dans son congélateur un sachet de cœur de poulet et si ça ne suffit pas, un sac de foie peut prendre la suite. De toute façon « tout est bon avec la cachaça ».

Sandro a dû tout apprendre de l’agriculture, cela ne faisait pas partie de son éducation, mais elle était synonyme, pour lui, de liberté. Elle permet de vivre sans dépendre d’un employeur. Pour lui, le marxiste, c’était l’idéal de vie. Aujourd’hui, son terrain accueille poules et chèvres, produit un potager, et surtout cultive du café, près de 350 kg par an dédié à la vente, son unique revenu.

La maison perchée à 1 300 mètres d’altitude offre une vue imprenable sur les collines avoisinantes, c’est une épreuve sportive à part entière d’y arriver à pied. Elle est adossée à la forêt primaire où gueulent parfois les meutes de singes. C’est ici que vivent les Muriquis qui ont donné le nom à son café. Muriqui veut dire « l’homme tranquille ». Ce sont les seuls singes aux caractères uniquement pacifistes alors qu’ils auraient pu vouloir en venir aux mains avec l’Homme qui lui a fragmenté son territoire, la Mata Atlantica, au point de faire de lui, l’espèce de singe la plus menacée d’extinction au Brésil. Pour laquelle de ces 2 raisons, Sandro a choisi ce nom pour son café, l’histoire ne le dit pas, mais nous avons notre petite idée…

Il paye parfois son choix de vie, même s’il est respecté dans la vallée pour son dur labeur, il a conscience de rester un marginal pour la plupart de ces compatriotes. Il en paye le prix fort quand sa femme le quitte pour une vie à la Capitale et lui interdit de voir ses enfants faute d’un versement de pension suffisante. Le visage de Sandro se ferme parfois…

3 jours avant notre départ, alors que nous observions notre récolte de café sécher dans l’étouffoir, il se rend compte que beaucoup de graines ramassées ne sont pas mures. « la récolte est foutue » répétait-il en retournant chez lui s’assoir sur le canapé, avant de se calmer un peu et de relativiser. D’habitude, seul, il n’a pas le temps de ramasser tout son café, il en perd donc des centaines de kilos tous les ans. Espérons que notre travail lui permettra de ne pas en perdre autant… Et puis nous sommes ces premiers wwoofers, les erreurs commises dans la gestion des volontaires lui serviront surement pour la suite.

Mariana, 30 ans, est arrivé dans la vallée il y a quelques années avec l’ambition de vivre de la terre. Elle a rencontré Sandro et depuis un an, il partage la petite maison avec elle. En plus du sourire qu’elle lui redonne, elle aide au jardin, à la récolte de café et à la cuisine. Elle fait également des tenues en crochet qu’elle vend dans les villages alentours et sur internet. Cerise sur le gâteau, elle aime le français à en apprendre des poèmes de Baudelaire par cœur, et fredonner des chansons françaises accompagnée de sa guitare. Bon, ses gouts musicaux restent à définir, malheureusement, quand on tape « chanson française » sur youtube, on tombe sur un clip de Shym. La prochaine fois, elle chantera du Pauline Croze, du Emily Loizeau ou du Jean-Louis Murat.

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Commentaires
S
Benoît! La barbe, n'y songe même pas ! (dixit Jessica)
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